Depuis 3 ans, une directive européenne vise à mieux protéger les lanceurs d’alerte. Depuis 3 ans, le gouvernement français traîne pourtant des pieds pour la transposer. Et si nous accélérions le mouvement ? Et si nous étions plus ambitieux que cette directive ? La Maison des lanceurs d’alerte (dont foodwatch est membre) formule 12 propositions dans un appel lancé à l’Assemblée nationale. Pour protéger la voix des lanceurs d’alerte, donnons de l’écho à cet appel.
En effet, 36 % des cadres français disent être témoins de pratiques contraires à l’intérêt général. 1 cadre sur 2 considère comme risqué le fait de les signaler selon un sondage Ugict-CGT de 2019. Choquant non ? Et pourtant, la suite est facile à deviner. Ils s’abstiennent de les dénoncer, permettant aux malversations de durer...
Malgré cela, de nouveaux scandales apparaissent chaque semaine. Panama papers, Mediator, Dépakine, contaminations et fraudes alimentaires, pollutions environnementales... Derrière ces affaires, il y a des hommes et des femmes qui osent prendre la parole pour dénoncer des dysfonctionnements et éviter des crises sanitaires, écologiques ou économiques.
Dénigrés, harcelés, mis au placard pour avoir défendu l’intérêt général : une situation intolérable
Nombre d’entre eux restent anonymes. Ils sont motivés avant tout par leur éthique et leur souci de l’intérêt général. Ils constatent des faits aux conséquences graves pour notre santé, notre environnement, pour le bon fonctionnement de notre démocratie ou pour le respect de notre privée. Et ils décident d’en référer aux autorités compétentes pour y remédier.
Malheureusement, suite à cet engagement fort, leur quotidien devient intolérable et leurs alertes sont encore trop rarement entendues. Lorsqu'ils sont salariés, ils sont licenciés, harcelés, mis au placard. Lorsqu'il s'agit de militants associatifs, de parents d'élèves, de riverains... ils sont dénigrés et font face à des agressions verbales, physiques, ou des poursuites judiciaires abusives. Ils peinent à identifier à qui s'adresser pour que les abus qu'ils dénoncent cessent. Leurs soutiens - journalistes, associations, syndicats - mais aussi leurs proches en paient les frais.
Cela doit cesser, pour une ambitieuse « loi lanceurs d’alerte » avant la fin de l’année
En 2016, la loi Sapin II a tenté de régler, en partie, ce problème. Elle a, par exemple, interdit de licencier ou de rétrograder les lanceurs d'alerte. Mais obtenir ce statut relève encore du parcours du combattant et cette loi comporte de nombreuses lacunes. Elle n'offre, par exemple, aucune garantie que les alertes soient traitées, ce qui est bien souvent la première demande des lanceurs d'alerte.
Nous demandons à présent au gouvernement et aux parlementaires d'aller plus loin et de saisir l'occasion inédite que représente l'impératif de transposition de la directive européenne pour la protection des lanceurs d'alerte.
En 2019, l'Union européenne a, en effet, pris la mesure du problème et adopté une directive qui améliore significativement les droits des lanceurs d'alerte en Europe. Cette directive doit être transposée en droit français avant la fin de l'année 2021. Elle impose aux États un certain nombre d'avancées par rapport au droit actuel, notamment en France. Elle met, par exemple, fin à l'obligation, pour un salarié, d'alerter d'abord au sein de son entreprise - obligation qui l'expose bien souvent aux représailles ou qui fait courir le risque de destruction de preuves.
Mais sur d'autres points, elle laisse aux États le soin de définir eux-mêmes les modalités d'amélioration de leur législation.
foodwatch et 28 organisations portent 12 propositions pour les lanceurs d’alerte
Depuis 2019, la Maison des Lanceurs d'Alerte s'est mobilisée et plusieurs dizaines d'autres organisations, pour alimenter le débat public sur ce sujet. Douze propositions concrètes ont été formulées pour compléter les dispositions de la directive. Elles abordent la question d'un fonds de soutien pour accorder des aides d'urgence aux lanceurs d'alerte en difficulté ; la simplification des procédures avec la mise en place d'un guichet unique auquel adresser une alerte et qui s'assure qu'elle soit suivie d'effets ; ou encore le renforcement des sanctions contre les "étouffeurs d'alerte" ou du rôle d'appui des syndicats sur les lieux de travail.
Ces propositions ont été adressées au gouvernement et aux parlementaires par lettre ouverte en 2019 puis en 2020. Des institutions reconnues telles que le Défenseur des droits ou la CNCDH - la Commission nationale consultative des Droits de l'Homme - ont publié des avis rappelant au gouvernement l'urgence et l'importance du problème.
À l'heure actuelle, nous n'avons aucune certitude que des mesures ambitieuses seront adoptées prochainement pour protéger les lanceurs d'alerte et garantir que leurs alertes soient traitées.
Nous, associations et syndicats mobilisés sur cette question, invitons donc toutes les personnes qui reconnaissent l'enjeu démocratique qu'est la défense des lanceurs d'alerte et de leurs alertes à signer notre appel.
Trop de personnes aujourd'hui sont témoins d'abus et se taisent par peur ou manque de moyens. Par ce silence, ce sont nos droits, nos libertés et notre intégrité qui sont menacés. Les lanceurs d'alerte sont des sentinelles qui construisent un monde souhaitable pour tous. Nous devons leur permettre de parler et nous assurer que cette parole est entendue.
À vous de porter la voix des lanceurs d'alerte à l'Assemblée nationale.
Signez notre appel pour porter la voix des lanceurs d'alerte à l'Assemblée nationale
Je signeSignataires
- Maison des Lanceurs d'Alerte
- Amis de la Terre France
- Anticor
- APESAC
- Attac
- Bloom
- CFDT Cadres
- CFDT Journalistes
- Foodwatch
- France Nature Environnement
- FSU
- Greenpeace France
- Informer n’est pas un délit
- Institut Veblen
- Ligue des droits de l’Homme
- Ma Zone Contrôlée
- Nothing2Hide
- Réseau Sortir du nucléaire
- Ritimo
- Sciences citoyennes
- Sherpa
- Solidaires Finances Publiques
- Syndicat de la Magistrature
- Syndicat National des Journalistes
- Syndicat National des Journalistes - CGT
- The Signals Network
- Transparency International France
- Ugict CGT
- Union syndicale Solidaires