Pub pour la malbouffe ciblant les enfants : la réforme de l’audiovisuel est l’occasion à ne pas rater pour enrayer l’obésité et le surpoids des enfants en France, presse foodwatch
Les débats sur la réforme de l’audiovisuel démarrent à l’Assemblée nationale ce mercredi 26 février. Dans sa version actuelle, le projet de loi ne permet aucunement de protéger les enfants - et leur santé - du matraquage publicitaire pour des produits alimentaires et boissons pourtant trop sucrés, trop gras, trop salés. Le gouvernement s’est contenté d’y inscrire que les industriels pourraient adopter des « codes de bonne conduite » … sur base volontaire ! Inacceptable pour foodwatch, alors qu’un enfant sur six en France est en surpoids ou obèse et que même la Cour des comptes a insisté en novembre sur le fait que les engagements volontaires étaient très insuffisants et qu’il fallait une loi. Les parlementaires ont déjà raté le coche avec la loi EGALIM en 2018, ils doivent se ressaisir et enfin s’engager à protéger la santé des moins de 16 ans. C’est aussi l’occasion de réduire les dépenses publiques puisque le coût des maladies liées à l’obésité et au surpoids est comparable à celui de l’alcool et du tabac, rappelle foodwatch.
La Commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale va donner ce mercredi 26 février le coup d’envoi des débats sur la réforme de l’audiovisuel. Ce projet de loi est une opportunité d’enfin concrétiser la recommandation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de règlementer la publicité et le marketing qui ciblent les moins de 16 ans pour des produits trop sucrés, trop gras, trop salés, à la télévision mais aussi sur tous les autres supports électroniques.
Il est urgent d’agir, car aujourd’hui en France 1 enfant sur 6 est en surpoids ou obèse, et la Direction générale du trésor estimait déjà en 2012 le coût social de la surcharge pondérale à 20 milliards d’euros par an…
Face à ce constat, deux réponses s’opposent : la première, portée par tous les experts, prône une loi pour encadrer efficacement ces pratiques et interdire publicité et marketing qui ciblent volontairement les jeunes pour des produits trop sucrés, trop gras, trop salés. La seconde voudrait faire croire que de simples engagements volontaires des entreprises de l’agroalimentaire pourraient suffire à limiter l’exposition des enfants au matraquage publicitaire et marketing de la malbouffe.
Or plusieurs études ont montré que les engagements volontaires n’étaient pas du tout efficaces pour assurer une prévention de la publicité et du marketing ciblant les enfants pour des aliments déséquilibrés. C’est aussi la conclusion du rapport de la Cour des comptes sur la prévention et la prise en charge de l’obésité de novembre 2019 : « La France devrait se doter d’une régulation normative de la publicité pour enfant ».
Le gouvernement joue en fait un double jeu : il reconnaît le problème puisqu’il inscrit un article dans le projet de loi de réforme de l’audiovisuel, mais tue dans l’œuf toute possibilité de mesures efficaces en faisant le choix de laisser carte-blanche aux industriels. L’article 54 « prévoit l’adoption de codes de bonnes conduite » de la part des acteurs de l’industrie agroalimentaire qui seraient ainsi censés s’autoréguler. Pour foodwatch, cette proposition n’est pas sérieuse.
« Comment peut-on oser écrire dans une loi qu’on compte sur la bonne volonté des géants de la malbouffe pour protéger les enfants du matraquage publicitaire et marketing ? C’est aberrant. On a déjà démontré avec des cas concrets comme Lu et Caprisun qu’ils ne tiennent pas ce genre de promesse. Et une loi est censée mettre des règles pour protéger les citoyens, pas donner carte blanche aux entreprises. », insiste Karine Jacquemart, directrice générale de foodwatch France.
Des député.e.s de plusieurs groupes avaient déjà porté cet objectif d’encadrer efficacement la publicité et le marketing qui ciblent les enfants pour des produits trop sucrés, trop gras, trop salés dans des projets de loi, notamment la loi EGALIM en 2018, mais la majorité les a alors bloqués.
Auront-ils cette fois le courage politique de voter cette mesure essentielle pour protéger les enfants et leur santé ? Pour foodwatch ce serait un vrai scandale de ne pas saisir l’occasion de ce projet de loi.
Note aux rédactions
- Projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique, n° 2488
- L’encadrement du marketing ciblant les enfants pour des produits trop gras, trop sucrés, trop salés est prévu dans laStratégie nationale de santé publique 2018-2022 (page 16).
- Lulu l’Ourson cible les enfants mais Mondelez nie (vidéo)
- L’engagement volontaire des industriels EU pledge : L’industrie alimentaire toujours championne de la malbouffe auprès des enfants in Euracti
- C’est la conclusion du rapport de la Cour des comptes sur la prévention et la prise en charge de l’obésité de novembre 2019, qui précise : « Le principe de l’autorégulation en matière de publicité alimentaire à destination des enfants s’est révélé peu efficace » (p.12) puis « La France devrait se doter d’une régulation normative de la publicité pour enfant. » (p.66).
- C’est également la conclusion du rapport de la Commission d’enquête parlementaire sur l’alimentation industrielle, renforcé par son rapport d’information du 5 février 2020 qui revient sur la faiblesse de la charte alimentaire du CSA de janvier 2020 – page 17
- De nombreuses autres études de cas l’ont démontré, par exemple : Huizinga, Kruse. Food industry self-regulation scheme “EU Pledge” cannot prevent the marketing of unhealthy foods to children. Obesity Medicine 1 (2016) 2451-8476.
- Malbouffe et marketing ciblant les enfants : comprendre l’enjeu – Résumé en 4 pages par foodwatch
- Ministère de l’Economie et des Finances : „ Le coût social de la surcharge pondérale avoisinait 20 Md€ en 2012 soit un montant comparable à celui de l'alcool et du tabac“.
Plusieurs études ont montré que les engagements volontaires étaient très insuffisants pour assurer une prévention efficace de la publicité et du marketing ciblant les enfants pour des aliments déséquilibrés.
Dans un rapport de 2016, la Commission sur les moyens de mettre fin à l’obésité de l'enfant de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) atteste : « des données incontestables montrent que la commercialisation d’aliments nocifs pour la santé et de boissons sucrées a un lien avec l’obésité de l’enfant. Même si l’industrie déploie un nombre croissant d’initiatives volontaires, l’exposition à la commercialisation des aliments nocifs pour la santé reste un problème majeur appelant un changement pour protéger tous les enfants de façon égale » :