« Gaver les enfants à coup de marketing pour la malbouffe est totalement irresponsable. Les politiques doivent suivre l’OMS et légiférer », prévient foodwatch
En France, un enfant sur six entre 6 et 17 ans est en surpoids ou obèse et le restera vraisemblablement à l’âge adulte. « Non, ce n’est pas la faute des parents. On a totalement perdu le contrôle », insiste foodwatch qui publie une nouvelle enquête. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) alerte depuis 2010 et demande aux gouvernements de légiférer. Nombre d’expert·e·s – Santé publique France, Inserm, Unicef, Haut conseil de la santé publique, Cour des comptes – abondent dans le sens de l’OMS : permettre aux fabricants de produits trop gras, trop sucrés, trop salés d’exposer les plus jeunes au marketing de la malbouffe aggrave leur risque de maladies cardio-vasculaires, de diabète de type 2 et même de cancer. Adepte du name & shame, foodwatch épingle des marques, partenariats et pratiques insidieuses. En cette rentrée, les parlementaires planchent justement sur des mesures afin d’enrayer l’épidémie d’obésité. Pour la santé des enfants, il serait irresponsable de s’en remettre au bon vouloir des industriels. Il est temps d’encadrer ces pratiques marketing délétères, selon foodwatch.
Paris, le 13 septembre 2023. Avec sa nouvelle campagne, foodwatch a enquêté sur le marketing de la malbouffe qui cible les enfants. Et foodwatch a un message fort pour les décideurs politiques et les parents : les adultes ont beau faire attention, l’environnement obésogène des enfants prend de multiples formes dont on a aujourd’hui totalement perdu le contrôle. Il est donc urgent d’encadrer le marketing et la publicité ciblant les enfants pour les produits mauvais pour leur santé.
Oasis se paie le rappeur Jul pour vanter ses boissons, Coca-Cola crée une canette avec la chanteuse Rosalia, Kinder (Ferrero) développe une app à télécharger, Pitch raconte des histoires de brioches en podcasts, les glaces Miko sont affublées de princesses, les chips Monster Munch s'incrustent dans le jeu Minecraft, et il y a aussi le partenariat entre le club de rugby le Stade français et Capri-Sun (pratique, le Président est propriétaire des deux marques), celui entre Disneyland Paris et les produits Vache qui rit ou Babybel ou les concours Hollywood chewing-gum avec Big Flo & Oli sur TikTok. Du matin au soir, les enfants baignent dans un environnement qui les encourage à préférer des aliments mauvais pour leur santé. Séduits, ils développent des préférences alimentaires catastrophiques pour leur santé. La consommation de toujours plus de produits trop gras, trop sucrés, trop salés contribue au surpoids et à l’obésité infantiles, dénoncent les expert·es en santé publique. Insidieusement, elle augmente leur risque de maladies cardio-vasculaires, de diabète de type 2, gras et même de cancer. Et c’est grave.
« Les géants de la malbouffe n’hésitent pas à élaborer des stratégies à la limite de la manipulation afin de s’immiscer au sein des familles et de saper les efforts d’éducation alimentaire des parents impuissants face à ces techniques marketing agressives. C’est totalement immoral et irresponsable quand on voit les conséquences de la malbouffe sur la santé des plus jeunes aujourd’hui et pour leur futur », Audrey Morice, chargée de campagnes foodwatch France.
foodwatch a passé au peigne fin 228 produits ciblant les enfants avec leur marketing. Au regard de ce que l’OMS considère comme des critères nutritionnels acceptables autorisant à faire la promotion d’aliments ou boissons auprès des enfants, le constat est désastreux : 86% des produits examinés en France ne passent pas le crash test du profil nutritionnel de l’OMS. Près de 9 produits sur 10 ne devraient pas être autorisés à faire du marketing ciblant les enfants tant ils sont hors des clous d’un point de vue nutritionnel.
« Depuis des années, le gouvernement a décidé de faire confiance aux industriels. De toute évidence, ça ne marche pas : les engagements volontaires des industriels, la sacro-sainte autorégulation, c’est du vent. foodwatch n’est pas la seule à l’affirmer : les expert·e·s de santé le martèlent depuis des années. Quand le gouvernement va-t-il les écouter ? », interpelle Audrey Morice.
Pour éviter toute réglementation sur leurs pratiques marketing, les géants Burger King, Coca-Cola, Danone, Ferrero, General Mills, Kellogg, Mars, Mondelez, Nestlé, PepsiCo, Unilever et consorts ont fait mine de montrer patte blanche en couchant dans la charte EU Pledge la promesse qu’ils ne cibleront pas les enfants de moins de 13 ans. Les résultats de l’enquête de foodwatch démontrent que c’est un fiasco total : leurs critères sont bien loin de ceux de l’OMS. C’est d’autant plus grave que les 22 entreprises signataires – alimentation et boissons - se targuent à elles seules de représenter plus de 80% des dépenses publicitaires alimentaires en Europe. Elles ne se privent pourtant pas de cibler les plus jeunes, comme le démontre aujourd’hui foodwatch.
Sur le plan économique, le coût du laisser-faire est considérable. Le coût sociétal de la surcharge pondérale était estimé par le Trésor public en 2012 à plus de 20 milliards d’euros par an. Il a certainement enflé depuis lors.
L’urgence est à la régulation. Et la France est très en retard. De nombreux pays - Norvège, Chili, Mexique, Pérou, Espagne, Allemagne, Canada, etc. - ont déjà mis en place, ou sont sur le point de le faire, un encadrement strict de ces pratiques marketing ciblant les enfants.
Depuis le début de l’été 2023, des parlementaires de tous bords politiques planchent sur des mesures visant à lutter contre l’obésité et auditionneront foodwatch fin septembre : une opportunité politique en or à saisir pour enfin encadrer le marketing et la publicité ciblant les enfants. foodwatch et les milliers de consommateurs et consommatrices mobilisé·es sur la question ne vont rien lâcher. C’est une impérative question de santé publique.
Sources
- Nouvelle enquête foodwatch (pdf) truffée d’exemples et de sources scientifiques : « Les enfants, cibles du marketing de la malbouffe : c’est l’heure de l’action politique », septembre 2023
- Bande dessinée (libre de droits) illustrant la surexposition des enfants à malbouffe, par Anaïs Slaney pour foodwatch
- Pétition « La malbouffe cible nos enfants, une loi doit les protéger » !
- Groupe de travail des parlementaires sur l’obésité