Communiqués de presse 07.10.2024

Nutri-score, affaire foodwatch : dissimuler les documents officiels relève de la “mauvaise administration” de la part de la Commission, selon la médiatrice européenne

Dans l’affaire portée par foodwatch depuis plusieurs mois qui demande l’accès aux documents relatifs aux débats européens sur l’étiquetage nutritionnel, la médiatrice de l'Union européenne, Emily O'Reilly, publie aujourd’hui sa décision : refuser l’accès aux documents à foodwatch est un cas de mauvaise administration. Pour foodwatch, le blocage de la Commission européenne sur la question du Nutri-score est inexplicable et inacceptable. 

Bruxelles, le 7 octobre 2024. Dans sa décision publiée ce 7 octobre, la médiatrice européenne reproche à la Commission européenne de ne pas avoir rendu publics des documents importants qui révéleraient pourquoi elle a mis sous le tapis son projet initial d'introduire un étiquetage nutritionnel obligatoire sur le devant des emballages. Le raisonnement de la Commission consistant à refuser partiellement une demande d'accès aux documents formulée par foodwatch « constitue un cas de mauvaise administration », précise la médiatrice. En février, la médiatrice européenne avait déjà demandé à la Présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, de « divulguer le document sans délai ». Ce que la Commission se refuse à faire.  

foodwatch suspecte que ces documents contiennent l’explication au blocage politique : pourquoi le logo Nutri-score n’est-il toujours pas obligatoire en Europe alors que l’Organisation mondiale de la santé elle-même préconise sa généralisation pour lutter contre les maladies non-transmissibles ? 

« Il est prouvé que le Nutri-Score aide les consommateurs à faire des choix alimentaires plus éclairés et plus sains. Un tel étiquetage nutritionnel, obligatoire et harmonisé dans toute l'Europe, est l'un des outils de santé publique les plus importants pour lutter contre la malbouffe, l'obésité et prévenir les maladies non transmissibles. Pourtant, la Commission a retiré son projet d'introduction d'un étiquetage nutritionnel sur le devant de l'emballage de l'agenda européen sans explication », explique Suzy Sumner, responsable du bureau bruxellois de foodwatch international.  

Information des consommateurs sur les denrées alimentaires : une question hautement politique 

En décembre 2022, la Commission européenne avait préparé une proposition visant à modifier le règlement relatif à l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires (INCO) mais celle-ci a ensuite inexplicablement disparu des agendas politiques. Cette proposition aurait suggéré, entre autres, un étiquetage nutritionnel harmonisé et obligatoire à l'échelle de l'UE sur la face avant des emballages.  

foodwatch a introduit deux demandes d'accès à des documents afin de comprendre pourquoi la proposition d'un étiquetage nutritionnel sur le devant des emballages n'a jamais vu le jour.  

Les premiers documents obtenus ont révélé des informations sur plusieurs réunions entre l'industrie agroalimentaire et la Commission européenne. Cependant, l'accès à l'avis du Regulatory Scrutiny Board (RSB) ou Comité d’examen de la réglementation, l'organe qui donne le feu vert pour qu'une proposition franchisse toutes les étapes préparatoires et soit prête à être publiée, ainsi que le projet d'évaluation d'impact et les notes des réunions, ont été refusés à foodwatch. Mais l’organisation de défense des consommateurs, qui milite pour la transparence, pense que ces documents contiennent potentiellement des informations-clés : le Regulatory Scrutiny Board (RSB) a-t-il donné son feu vert à la proposition - ou non ?   

Dans une lettre de refus adressée à foodwatch au cours de la procédure de demande d'information, la Commission européenne a fait valoir que la communication de ces documents « saperait le processus décisionnel des institutions » et qu'il n'y avait « pas d'intérêt public prépondérant à le faire ». foodwatch a donc fait appel à la médiatrice européenne en janvier 2024. 

« La médiatrice européenne a conclu à un cas de mauvaise administration et nous nous réjouissons qu’elle soutienne pleinement le fait que les documents auraient dû être divulgués par la Commission. Cependant, malgré les demandes de la médiatrice au plus haut niveau de la Commission, l'accès à ces documents nous est toujours refusé.  Qu'y a-t-il à cacher ? La Commission doit la transparence aux citoyens et citoyennes européen.nes et une explication claire sur les raisons pour lesquelles elle n'agit toujours pas, malgré le nombre croissant de diabètes de type 2 et d'autres maladies non transmissibles. Pendant qu’on perd un temps fou, des industriels comme Danone ou Bjorg en profitent pour rétropédaler sur l’affichage du Nutri-score en décidant de ne plus l’afficher sur tout ou partie de leurs marques. La Commission prétend être sérieuse dans sa lutte contre le cancer et les maladies cardiaques mais refuse d'avancer sur un outil simple dont l'efficacité pour aider les consommateurs à faire des choix plus sains est prouvée. Nous avons perdu cinq ans. Il est temps que la nouvelle Commission agisse », commente Suzy Sumner du bureau bruxellois de foodwatch.  

foodwatch soutient fermement l'introduction d'un étiquetage obligatoire et harmonisé sur le devant des emballages dans toute l'Union européenne, déjà adopté dans 8 pays mais pour l’instant, sur une base volontaire : la France, l’Allemagne, le Luxembourg, la Belgique, la Suisse, les Pays-Bas, le Portugal et l’Espagne. 

Sources :