Produits plus petits et prix gonflés : ce qui bouge sur l’inflation masquée
Lancée le 1er septembre dernier, notre campagne pour dénoncer la réduction de la taille de certains produits de grande consommation alors que leur prix au kilo ou au litre augmente a eu un écho énorme et a suscité des réactions du côté des entreprises et même de madame la ministre. On vous détaille tout cela.
La shrinkflation (du verbe shrink, « rétrécir » en anglais) ou inflation masquée est une pratique choquante quand elle s’opère en catimini. Notre enquête a montré que c’est généralement le cas, comme ces dernières années chez Kiri, St Hubert, Saint Louis, Salvetat, Lindt ou encore Teisseire.
« Qui arrive à voir qu’il manque 2 grammes à son Kiri ? »
C’est l’une des phrases entendues dans le reportage de Complément d’enquête diffusé sur France 2 le 1er septembre (voir le replay) et prononcées par notre responsable de campagnes, Camille Dorioz, qui a mené cette enquête pour foodwatch. Vous êtes 1,3 millions à avoir regardé l’émission , signe que ce sujet vous intéresse. L’émission Capital sur M6 a également dédié un reportage au sujet .
Des centaines de médias – journaux, télévision, radio, web - ont relayé notre campagne et partagé nos informations : France Info TV , Le Monde , TF1 , C à vous (France 5 ), ou encore Brut. Le Parisien y a même consacré sa Une.
Cette campagne a trouvé un énorme écho dans les médias
L'inflation masquée à la une des médias, avec Camille Dorioz, Responsable des campagnes chez foodwatch France
Réaction politique immédiate : la ministre Olivia Grégoire demande une enquête
Fait rare, alors que nous n’avons pas interpellé directement le gouvernement – notre pétition cible les six marques que nous épinglons ainsi que la grande distribution -, la ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme, Olivia Grégoire, s’est immédiatement saisie du dossier et l’a fait savoir par ce tweet, estimant que :
On ne joue pas avec le porte-feuille des Français.
— Olivia Gregoire (@oliviagregoire) September 2, 2022
J’ai demandé à la @dgccrf de mener immédiatement une série de contrôles afin de constater s’il y a des pratiques commerciales trompeuses. https://t.co/XoHHaIrj1L
Mi-septembre, la ministre affirmait que la Répression des fraudes avait mené « des contrôles dans plus de 100 établissements où seules 0,5% des références vérifiées sont en infraction. Ces anomalies, principalement sur le respect des règles d’information du consommateur, feront l’objet de sanctions ».
Nous en saurons plus d’ici octobre, où une communication officielle sur ces contrôles est prévue. Il va de soi que nous tiendrons cela à l’œil et d’ici là, nous continuons de demander la totale transparence sur ces abus : les produits, les marques, les infractions identifiées ainsi que les sanctions.
Les marques et la grande distribution ne nient pas mais ne s’engagent pas (pour l’instant) à être plus transparentes
Au vu de l’exposition médiatique et de la réaction de la ministre, les marques pointées du doigt par notre campagne et les destinataires de notre pétition ont été contraints de réagir.
Le PDG de Système U, Dominique Schelcher, a condamné la pratique de la shrinkflation lors du débat après la diffusion de Complément d’enquête. Mais il n’a pas pris d’engagement clair à ce sujet.
Même son de cloche de la part de Michel-Edouard Leclerc, qui a dédié un article sur son blog à la question, et dans lequel il souligne qu’ « il n'est pas dans l'intention des stratèges de nos marques de distributeur de copier ces pratiques industrielles. Je me suis renseigné aussi : ces pratiques de reconditionnement ne sont pas considérées juridiquement comme des fraudes : c'est légal ». C’est pour cela que nous souhaitons que les marques et distributeurs s’engagent à communiquer clairement en face avant des produits lorsqu’ils en réduisent la taille. Est-il donc prêt à joindre des actes à ses paroles ? Questionné par Apolline de Malherbe dans la matinale de RMC/BFM sur la possibilité d'ajouter une étiquette mentionnant le changement de format sur ses produits, Michel-Edouard Leclerc a botté en touche.
Interrogée sur le plateau de BFMTV, Cécile Béliot, Directrice générale du groupe Bel qui commercialise Kiri, a dit « respecter infiniment le combat de foodwatch ». Elle a justifié le changement de format par la nouvelle recette de Kiri. Son argument ne nous a pas convaincus : une nouvelle recette n’excuse en rien le manque de communication sur la réduction du grammage.
Lindt France nous a écrit en expliquant que « le prix au kilogramme a augmenté, reflétant la volatilité et la hausse des coûts de (ses) opérations ». Là encore, aucun engagement à informer de façon transparence les consommateurs et consommatrices des changements de format.
D’autres marques ont pris le parti de blâmer les grandes surfaces : « Nous ne pouvons que conseiller un prix de vente que le distributeur est libre d'appliquer ou non », indique le service consommateurs de Danone France (qui commercialise Salvetat) au média Novethic... alors que les informations sur l'emballage ne sont évidemment pas du ressort des supermarchés, mais bien de celui des fabricants.
Vous êtes beaucoup à être choqué·es par ces abus et à avoir signé notre pétition. Si ce n’est déjà fait, c’est par ici. Nous ne lâcherons rien tant que nous n’aurons pas obtenu des engagements clairs à nous informer en toute transparence.
Si vous avez déjà signé, n’hésitez pas à nous envoyer d’éventuels témoignages de produits ayant subi une shrinkflation.
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