Actualités 11.08.2023

Réautorisation du glyphosate : que cache le coup d’accélérateur de l’Europe ?

Mi-juillet, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a enfin publié son avis sur le glyphosate, l’herbicide le plus utilisé à travers la planète et la substance active du Roundup de la multinationale de l’agrochimie Bayer-Monsanto. Des conclusions cruciales, car au cœur de la décision politique, mais partielles, le rapport complet étant attendu… après le vote par les États-membres de sa réautorisation pour 15 ans. Entre mise en lumière des zones d’ombre des conclusions de l’EFSA et appel à la responsabilité des politiques vis-à-vis du principe de précaution, foodwatch revient en détail sur cet avis et sur les étapes à venir. Il va falloir jouer serrer à la rentrée !

Il y a des combats emblématiques, qui peuvent marquer un tournant. Le glyphosate est de ceux-là. Substance active du célèbre Roundup de Monsanto, herbicide le plus vendu au monde, le glyphosate est un exemple frappant de la palette des stratégies et basses manœuvres des lobbies de l’agrochimie et de l’agroalimentaire main dans la main, au détriment de la santé humaine et de la biodiversité. Le feu vert donné par l’EFSA ne peut donc être un passe-droit permettant aux politiques de se défausser de leur responsabilité vis-à-vis du principe de précaution. Le glyphosate, nous n’en voulons plus, ni dans les champs, ni dans nos assiettes ! 

L’échéance politique est proche, car la Commission européenne tente d’accélérer le dossier lié à sa réautorisation, pour 15 ans cette fois-ci ! Selon une fuite, les premières discussions devraient avoir lieu autour du 15 septembre pour une date de vote des Etats membres début octobre. Le temps presse, et dans cette lutte contre le glyphosate, votre mobilisation fait la différence.

Réautorisation du glyphosate : une saga bis repetita qui doit cesser

La procédure de vote à venir en octobre 2023 est la même que celle de 2017, au cours de laquelle les lobbies de l’agrochimie avaient réussi à arracher un sursis de 5 ans de plus pour le glyphosate, malgré l’affaire des Monsanto Papers, qui avait largement entaché la crédibilité de l’avis de l’agence de sécurité alimentaire européenne. lls dévoilaient les vastes manœuvres des lobbies pour dissimuler les effets du glyphosate sur la santé et influencer les agences étatiques chargées de la santé. A l’époque, la France avait été en phase avec l’engagement présidentiel de 2017 et avait voté contre sa réautorisation. 

En 2022, alors que les 5 ans accordés en 2017 arrivaient à échéance, la réautorisation a donc été remise sur la table. Entre octobre et décembre 2022, les Etats membres votent à plusieurs reprises, sans parvenir à une majorité pour ou contre. Cette fois, la France change son fusil d’épaule et s’abstient lâchement. Finalement, la Commission prend la décision de réautoriser le glyphosate pour 1 an, en attendant l’avis des autorités sanitaires européennes dont les conclusions ont été publiées en juillet. 

Comprendre les différents votes et les scandales autour du glyphosate 

Rapport de l’EFSA : face aux zones d’ombre, un principe de précaution à respecter

Dans ses conclusions, l’EFSA donne son feu vert à la réautorisation du glyphosate pour 15 ans. Impossible pour nous aujourd’hui de vous en dire plus sur les arguments scientifiques qui justifieraient cet avis : en effet, la publication intégrale du rapport est prévue pour fin octobre ou début novembre, alors que le vote des États membres est lui prévu pour… début octobre. Vous voyez le problème ? 

Sans le rapport complet de l’EFSA, impossible de vérifier les études scientifiques utilisées en amont du vote. En bref, les États membres sont sensés voter une réautorisation pour 15 ans, et ce sans avoir toutes les cartes en main. Pourtant, disposer des informations scientifiques et d’un temps dédié pour les analyser est essentiel à leur décision éclairée et devrait être la norme.

Et au vu des précédents scandales autour des avis de l’EFSA sur le glyphosate, comment pourrions-nous faire une confiance aveugle à l’avis des autorités sanitaires européennes ? Pire encore, ce saucissonnage de l’information sur fond d’opacité généralisée empêche un contre-pouvoir citoyen comme foodwatch de faire son travail de lanceur d’alerte pour informer et faire respecter le droit de toutes et tous à une alimentation saine et sans risques.

Pourtant, l’EFSA admet plusieurs angles morts auxquels elle est dans l’incapacité d’apporter des réponses :

  • L’évaluation d'une des impuretés du glyphosate car il manque de données sur le potentiel clastogène (capacité à casser l’ADN) ;
  • L'évaluation des risques alimentaires pour les consommateurs et consommatrices à cause de données incomplètes, même si l’EFSA ne s’attend pas à ce que les résidus dans ces cultures soient supérieurs au Limite maximale) ;
  • L'évaluation des risques pour les plantes aquatiques, par manque de données.

Autant de zones d’ombre qui nous font nous demander comment les conclusions de l’avis peuvent pencher autant pour une réautorisation...La décision devrait être simple : le glyphosate présente des risques importants pour la santé et pour l’environnement, il doit donc être interdit par principe de précaution.
 

Questions / Réponses sur les pesticides

Qu'est ce qu'un pesticide ? Combien de résidus de pesticides trouve-t-on dans les pains, les farines, les céréales de petit-déjeuner, etc. ? Quel est le danger des résidus de pesticides pour la santé des consommateurs ?

EN SAVOIR +

Interdiction du glyphosate : rappelons sa promesse à Emmanuel Macron

C’est sur cette base qu’en 2017, Emmanuel Macron s’était engagé à l’interdire en France. Il a reculé sous le poids des lobbies de l’agro-industrie : l’année dernière, lors d’un vote pour réautoriser le glyphosate, la France s’est lâchement abstenue. Le vote de la France sera-t-il un nouveau renoncement de notre gouvernement ? Sacrifiant, à nouveau, la santé publique pour les intérêts privés d’une poignée d’industriels.

Cela n’est pas acceptable ! C’est maintenant et en urgence qu’il faut prendre la décision de protéger en priorité la santé des agriculteurs et agricultrices, et de l’ensemble des citoyen·nes.  

Fortes d’une mobilisation de plus d’un demi-million de personnes, plus de 30 organisations unies avec foodwatch exigent aujourd’hui que la France défende l’interdiction du glyphosate en Europe en 2023. Nous ne lâcherons rien, nous rappellerons à Macron sa promesse, jusqu’à obtenir l’interdiction du glyphosate. 

Ce combat est crucial, car au-delà du glyphosate, c’est l’histoire de la contamination de notre alimentation qu’il faut changer : résidus de pesticides, perturbateurs endocriniens, huiles minérales, additifs, etc… Avec vous et grâce à votre soutien, foodwatch continue le combat pour que la France ne recule pas et vote NON au renouvellement du glyphosate et que cette décision l’emporte en Europe. 

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