Santé publique France, établissement public sous la tutelle du ministère de la santé, a publié aujourd’hui son rapport « exposition des enfants et des adolescents à la publicité pour des produits gras, sucrés, salés ». Il pointe clairement du doigt l’impact de la publicité de la malbouffe sur les enfants et adolescents et son rôle dans l’épidémie d’obésité en France. Comme foodwatch, l’institut demande un encadrement clair de ces pratiques nocives. Il est plus que temps d’enfin protéger la santé des enfants et prévenir l’obésité, au moment où la crise du Covid a rendu la précarité sanitaire due au surpoids encore plus évidente. Les parlementaires et le gouvernement doivent se ressaisir et interdire le marketing qui cible les enfants pour les produits trop gras, trop sucrés, trop salés.
Covid et obésité : une épidémie peut en cacher une autre
La crise du Covid-19 ne nous a que trop rappelé la précarité sanitaire dans laquelle la pandémie silencieuse du surpoids et de l’obésité met nos sociétés. Le Haut Conseil de la Santé Publique a identifié l’obésité comme facteur de risque de développer une forme grave de Covid-19. Selon le Canard Enchainé, 75% des moins de 50 ans admis en réanimation étaient obèses.
Si les causes de l’obésité sont multiples, Santé publique France fait le même constat que l’Organisation mondiale de la Santé et met les points sur les i dès la première page de son étude : le marketing alimentaire est un rouage de l’obésité chez les plus jeunes.
En effet, la publicité a une énorme influence sur les enfants. Ce sont donc des cibles de choix. Et ça marche, les enfants et les adolescents sont nettement plus nombreux que les adultes à consommer de la malbouffe et le rapport identifie la publicité « comme un facteur important de la consommation excessive de ces produits ». Résultats, la France ne fait pas exception, avec un enfant sur 6 en surpoids ou obèse et un adolescent sur 5. Il est urgent d’endiguer cette autre épidémie à la source.
Les enfants sont particulièrement vulnérables au marketing alimentaire, du fait notamment de leur moindre capacité à discerner l’objectif du marketing alimentaire et à faire des choix rationnels et conscients - extrait du rapport de Santé publique France
Le mirage des engagements volontaires des industriels de la malbouffe
Afin d’éviter toute contrainte règlementaire, les industriels ont fait amende honorable et ont signé des chartes d’engagement, promettant entre d’autres d’arrêter de cibler les enfants. Nous avions déjà dénoncé l’inefficacité de ces pratiques, et Santé Publique France le confirme clairement : « Le principe de l’autorégulation en matière de publicité alimentaire à destination des enfants s’est révélé peu efficace (…) La France devrait se doter d’une régulation normative de la publicité pour enfant ».
En effet, là où les engagements volontaires des entreprises étaient censés réduire l’impact du marketing, Santé Publique France relève qu’en 2018, les publicités pour des produits Nutri-Score D et E représentent 53,3 % des publicités alimentaires vues par les enfants et 52,5 % des publicités vues par les adolescents.
Du côté de la loi, les autorités avaient supprimé la publicité dans les programmes télé à l’attention des jeunes (moins de 12 ans) sur les chaînes publiques. Si le principe était bon, l’interdiction ne concerne finalement que 1% du temps passé par les 4-17 ans devant la télé. Une goutte d’eau face à l’océan de publicité auquel ils font face, à la télévision mais aussi de plus en plus sur les réseaux sociaux.
Les programmes jeunesse qui font actuellement l’objet d’interdiction de publicité sur les chaînes publiques et de mesure d’autorégulation de la part des industriels de l’agroalimentaire représentent 0,1% des programmes diffusés et moins de 0,5% des programmes vus par les enfants - extrait du rapport de Santé publique France
Le gouvernement doit se ressaisir
En février, lors d’un débat sur la réforme de l’audiovisuel, le gouvernement – le Ministre de la culture Frank Riester - et la députée Aurore Berger refusaient d’encadrer ces pratiques davantage – malgré des propositions de députés de différents bords. Ils se réfugiaient encore derrière le mirage des engagements volontaires pour éviter d’imposer de telles contraintes aux industriels de la malbouffe par le biais d’une loi. Aujourd’hui, ces arguments ne tiennent plus. Même la charte du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel – dont le ministre de la culture ventait l’efficacité – est qualifiée par Santé publique France de faiblement efficace.
foodwatch continue son action pour faire interdire le marketing qui cible les enfants pour les produits trop gras, trop sucrés, trop salés. Plus nous serons nombreux à porter cette voix, plus nous serons à même de faire adopter cette mesure lors de la réforme de l’audiovisuel.
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